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Dimanche 08/02/2015 à 20H34 Avignon : Vaucluse Vélo Malvoyant Balade

11 Février 2015

SE BALADER A VELO QUAND ON NE VOIT PAS, C'EST POSSIBLE ! Actualités Dimanche 08/02/2015 à 20H34 Avignon : Vaucluse Vélo Malvoyant Balade

Le défi est de taille : piloter un tandem pour permettre à une personne déficiente visuelle d'avaler des kilomètres. Difficile mais pas insurmontable, la pratique mise sur l'échange dans le duo

Partir et repartir. Descendre et remonter. Franchir des cotes, en dévaler d'autres. Je serai les yeux. Il serait les jambes. Nous serions le moteur. Etre deux, c'est être trois avec le vélo. Pédaler quand on ne voit pas, c'est du jamais vu ! Et pourtant... Il est possible de pédaler ensemble, de défier la vie qui vous a fait perdre la vue. Je l'ai fait avec Jean-Paul. On l'a fait. Lui derrière, moi en tête, nous sur un tandem. Tous les deux loin devant.

En ce samedi matin, les bénévoles sont venus nombreux pour permettre à Odile, Patricia et les autres de faire du sport. Membres de l'association Valentin Haüy, ils ne voient presque plus ou plus du tout, mais leur cécité ne les empêche pas de faire tout comme tout le monde

Aujourd'hui, c'est vélo ! Grâce à Vélo Loisir Provence qui prête les tandems, voilà les adhérents prêts pour leur sortie mensuelle. Je monte sur le tandem avec Jean-Paul qui me prodigue ses premiers conseils. Avant de faire des kilomètres, il faut apprendre à démarrer. "Un, deux, trois, on y va !" Les pieds droits sont sur les mêmes pédales. On fait tourner les roues. On a trouvé le rythme. Le premier tour de piste, je suis un peu hésitante et impressionnée.

"Il faut que le porteur ait confiance en son pilote"

Le plus difficile est à venir : s'arrêter ensemble. "Il faut que tu me dises quand tu vas freiner et quand on va vraiment s'arrêter. Je dois mettre le pied à terre en premier. Tu dois te relever de la selle et descendre ton pied gauche", explique Jean-Paul. Malgré ma bonne volonté, le tandem nous tombe dessus. On se relève sans mal. Les habitués se veulent rassurants. "La première fois, c'est toujours un test. Il faut que le porteur ait confiance en son pilote, sourit Georgette Bridon, membre de l'association. La première fois, on se teste. Après, c'est du partage".

Le rodage passé, nous voilà sur la route. Direction Oppède. J'ai du mal à passer les vitesses du tandem et suis un peu stressée. Avec mon partenaire, nous sommes les derniers, mais nous allons nous rattraper dans la cote. Nous n'avons pas mis un pied à terre. En chemin, nous parlons beaucoup. Mon équipier m'encourage et de mon côté je lui décris le paysage. "Attention, on va passer sur un ralentisseur ! Ça va comment ? Tu es prêt pour la montée ? On va passer sur un pont en contrebas duquel se trouve un champ de courges !" Je fais de mon mieux et vais vite m'apercevoir qu'il faut être vigilante. Pédaler avec quelqu'un qui ne voit pas est une responsabilité.

Une responsabilité

Avec Jean-Paul, nous avons chuté deux fois, toujours à l'arrêt, durant notre périple le matin. Évidemment, nous ne sommes pas tombés à vive allure, mais j'ai eu vraiment peur de le blesser. Mon partenaire a toujours tout fait pour me tranquilliser. "Tu sais, ça, ce n'est pas grave. Un jour, il y en a un qui m'a oublié..." Je ne le crois pas vraiment, mais il parvient à me faire sourire. Nous voilà repartis. Je me sens de mieux en mieux et nos coups de pédales nous permettent de rejoindre le groupe.

Le vent froid nous glace les visages. La pause déjeuner s'annonce salvatrice. Deux heures après, les blousons refermés jusqu'au cou, bien rassasiés, nous remontons sur le vélo. Cette fois, nous sommes en tête du groupe. Je suis prête à ne pas me laisser dépasser et je n'ai pas envie de décevoir Jean-Paul. Des kilomètres pleins les pattes, nous nous dirigeons vers Lacoste... Je pédale, je pédale sans m'apercevoir de l'arrivée d'un méchant point de côté.

Ce sera le point final de l'aventure... Arrivés à Goult, on se congratule, on échange quelques mots et impressions, on s'hydrate aussi. "Pour une première fois, dis donc, ce n'était pas si mal", me félicite Xavier. On se redonne rendez-vous pour une prochaine fois en se promettant de faire mieux. Le lendemain dimanche. Mes jambes ont déjà tout oublié. Mes bras s'en souviennent encore. J'étais les yeux. Mais Jean-Paul, le véritable moteur de cette expérience inoubliable.

Mélanie Ferhallad